La distribution
Vincent Babel
Céline Bolomey
Christine Brammeier
Jacques Denis
Bernard Escalon
Jean-Louis Johannides
mise en scène Sandra Amodio
assistée par Vincent Bonillo
dramaturgie Marco Sabbatini
musique composée et interprétée
par percussions Dug Taylor
basse et architecture sonore Rodolphe Bauchau
scénographie Adrien Moretti
costumes Anna Van Brée
lumières Cédric Pipoz
construction Alain Cruchon
Philippe Brunischolz
peinture et décoration Béatrice Lipp
réalisation des costumes Elisabeth Marion-Veyron
Christine Piqueray
effets spéciaux Salamandra -
Lukas Berchtold
coordination technique Pierre - Alain Besse
Ludovic Buter
Angelica Fricker
administration Philippe Clerc
photographe Christian Lutz
production Carré Rouge Cie
Avec le soutien du Département des affaires culturelles de la Ville de Genève, du Département de linstruction publique de lEtat de Genève, de Pro Helvetia - Fondation suisse pour la culture et de la Fondation Oertli
Remerciements : Comédie de Genève, Vertical Danse et
Pierre-Edouard Jaquerod
Entretien avec Sandra Amodio
- Pourquoi avoir choisi de monter une pièce de F. Arrabal?
- Cest tout dabord le titre qui ma accrochée : je lai trouvé très évocateur, avant même de savoir quil sagissait dune pièce de F. Arrabal. Et en lisant l|uvre, je me suis tout de suite senti concernée par les thèmes évoqués par lauteur. Peut-être parce que je lai découverte à la fin du XXe siècle, je considère cette pièce comme une annonciation joyeusement provocatrice du passage dun siècle à lautre.
Je me suis très vite intéressée - et attachée - au personnage dArrabal : jai lu ses romans, vu ses films et étudié son cursus, dont lun des points forts est la fondation du mouvement panique avec ses amis Jodorowski et Topor. Ils ont repensé le théâtre dans sa forme et son fond. En tant que jeune créatrice, cest une source de connaissance et de formation que daller piocher dans lunivers de ceux qui ont contribué à la pensée théâtrale du XXe siècle. Donc, en abordant cet auteur, on aborde aussi une manière de concevoir lart théâtral. En choisissant de monter Arrabal, on ne choisit pas uniquement un texte mais un code de jeu propre à l|uvre.
- Quelle est la place du Fou rire des Lilliputiens dans l|uvre dArrabal?
- Cest lune des dernières pièces de lauteur. Elle a été écrite en 1994 et publiée en 1996.
- Comment définiriez-vous lécriture théâtrale dArrabal?
- Dans Le fou rire, nous sommes en présence dun texte référentiel, fondé sur des contrastes percutants. Nous sommes face à ce que nous pourrions appeler une dramaturgie de la contradiction et de la démesure. Cest une sorte de kaléidoscope des contradictions humaines.
- En quoi cette nouvelle création se rattache-t-elle à vos précédents spectacles?
- Il sagit ici dun théâtre de la confusion et de lexcès, qui fait appel à la fantasmagorie. Un théâtre de lextrême, dans la mesure où le grotesque, le sublime, le sordide, le beau et le vulgaire coexistent dans un univers concentré. Un théâtre de questionnements, de folie et de surréalisme au rythme effréné. Par le choix de ce texte, je me suis éloignée de la destinée de Gilles de Rais dans La Plaie et le Couteau ou dAdriana dans Nocturne de femme, car jaborde cette fois la tragédie par le rire, et je laisse donc place au grotesque pour entrer de plein pied dans la tragi-comédie. Mais ce qui relie tous mes spectacles, ce sont - au-delà des genres et des registres - les images évoquées par ces différents univers.
- De quelle façon avez-vous travaillé avec vos comédiens?
- Je les ai emmenés sur la piste du jeu grotesque, donc dans un jeu de rupture et de folie, afin quils aient le sens de la démesure et dans un jeu de simplicité sans affectation.
- Quel rôle accordez-vous à la musique et à la lumière?
- La musique est un partenaire premier dans la construction du spectacle. Rodolphe Bauchau, et le percussionniste Dug Taylor, ont été présents dès le début des répétitions pour insuffler les ambiances et les rythmes. Ils créent un univers qui vient soutenir la tension dramatique et prennent en charge le monde des Lilliputiens : ils interviennent donc en live. La musique est personnage, partenaire à part entière.
Quant à la lumière créée par Cédric Pipoz, elle est conçue de manière à renforcer les ambiances ou à soutenir le sous-texte de la scène. Cédric Pipoz nous emmène dans des univers oniriques où la lumière raconte à sa façon laction de la pièce. Bref, la lumière et la musique mettent en relief les émotions et les sentiments des personnages.
- Comment faut-il interpréter le titre de la pièce? Que représentent pour vous les Lilliputiens?
- Rire nerveux, rire fou, rire dévastateur, rire provocateur. Quel quil soit, il balaye dun coup de gorge la bêtise et le sérieux de notre siècle et de notre condition humaine. Il dénonce laliénation de nos sociétés avancées en perdition.
Les Lilliputiens sont une transposition ironique du déclin de notre société. Ils sont également une émanation de chacun de nous : ne portons-nous pas en nous et le géant et le Lilliputien ? Ils sont aussi le monde microscopique que lon ne perçoit pas si lon ne fait pas leffort de se pencher pour aller à la rencontre de ce qui est en nous. Ils sont le gai savoir, le lutin qui nous manipule, espiègle et frondeur.
- Quelle est pour vous la morale de cette fable?
- La morale de ce conte surréaliste est que nous ne pouvons trouver des solutions quen opérant une introspection. Arrabal soulève toutes sortes de questions mais namène aucune solution, et la fin demeure ouverte. Si nos sociétés continuent à agir de la sorte, nous courons à notre perte. Lorsque tout est tronqué, faux et confus, il ne reste que le rire pour oublier le danger dune existence étriquée, prisonnière des conventions morales.
|